G. GERON, RC. RUDIGOZ [2], PH. AUDRA [3], P. GAUCHERAND [2], JM. THOULON [3]
[2] Maternité de l'hôpital de la Croix-Rousse, Lyon.
[3] Maternité de l'hôpital Édouard Herriot, Lyon.
Au cours de ces dernières années, l'acide urso-désoxy-cholique a été proposé dans le traitement de la cholestase gravidique. Le but de cette communication est de faire le point sur son efficacité. Ce traitement étant de plus en plus utilisé malgré l'absence d'AMM dans cette pathologie. Si pour la mère, la cholestase ne présente pas de risques majeurs en dehors de l'hypoprothrombinémie, cette pathologie expose classiquement le foetus à une prématurité, une souffrance foetale aiguë ou une mort foetale in utéro. Ces risques restent aujourd'hui mal estimés.
Pour tenter de faire le point, nous avons réalisé une étude rétrospective à propos de 103 dossiers de cholestases gravidiques entre 1996 et 2001 dans les hôpitaux de la Croix-Rousse et Édouard-Herriot à Lyon. Sur ces 103 patientes, 26 ont été traitées par Delursan et du fait des grossesses multiples 37 enfants sont nés. L'action sur le prurit a été spectaculaire. D'un point de vue biologique, les résultats sont plus mitigés puisque environ une patiente sur deux a vu ses acides biliaires et sa cytolyse diminués.
En ce qui concerne les résultats néonataux, 54 % des enfants sont nés prématurément contre 30 % dans le groupe contrôle non traité. 8 % ont présenté une asphyxie néonatale (définie par un apgar à 5 minutes inférieur à 7 et/ou un Ph artériel < 7,15) contre 9 % dans le groupe contrôle. 37 % ont été mutés en unité de soins intensifs contre 25 %. Il n'y a eu, dans les deux groupes, aucune mort foetale in utéro ni aucun décès néonatal. Le taux de prématurés et de mutations en USI, plus important dans le groupe Delursan que dans le groupe contrôle, semble lié à un biais. En effet, les patientes traitées par Delursan présentaient les cholestases les plus importantes et les plus précoces. Si l'on s'intéresse aux mutations en USI, en séparant les prématurés des enfants à terme, les résultats sont un peu différents. Avant terme le nombre d'enfants mutés est identique dans les 2 groupes : 14/20 (70 %) dans le groupe Delursan contre 21/29 (72 %) dans le groupe contrôle. À terme, aucun enfant sur 17 n'a été muté dans le groupe Delursan, contre 3 sur 67 dans le groupe central. Ces résultats sont plutôt en faveur du Delursan, mais les effectifs sont trop faibles pour conclure.
Dans la littérature, le Delursan apparaît comme un traitement sans risque pour l'enfant et pour la mère. Il entraîne le plus souvent une diminution significative du prurit ainsi que des acides biliaires et de la cytolyse. L'étude de Berkane (Acta Obstet Gynecol Scand 2000 ; 79 : 941-946), à propos de 43 cholestases et 19 traitements par Delursan, retrouve des chiffres comparables à notre série.
En conclusion, l'acide urso-désoxy-cholique améliore le prurit dans la majorité des cas, diminue les acides biliaires et la cytolyse dans la moitié des cas et semble jusqu'à ce jour, présenter une totale innocuité pour la mère et l'enfant. Mais il n'est pas possible de dire s'il diminue le risque de prématurité, de souffrance foetale et de mort in utéro.